Chacun d'entre nous, sur une plateforme telle que Cowblog, connait plus ou moins la difficulté de l'écriture. Retranscrire ses pensées, le plus justement possible, afin d'y rester fidèle, afin que le lecteur comprenne...
Et lorsqu'il s'agit d'un écrit professionnel, l'exercice est d'autant plus hardu. Chaque mot doit être choisi très finement. En tant que travailleur social, l'écrit doit restituer des faits, une réflexion concernant la personne que l'on accompagne. Mais il ne doit pas desservir cette personne. Il doit être objectif. Il doit être argumenté pour mener au mieux le projet établi avec et pour la personne.
Il y a encore 15mn, j'étais à écrire. En cours, l'exercice est simple: on prend des éléments donnés, on les synthétise, on les transpose, on ajoute un soupçon de réflexion, de théorie et pouf! ça fait un écrit. Dans la réalité, l'enjeu n'est pas le même. Par un seul écrit, on a parfois le destin d'une personne au bout des doigts. Dans la réalité, on est impliqué émotionellement, qu'on le veuille ou non.
Dans la réalité, l'écrit que j'ai à faire est d'autant plus compliqué que toute la situation familiale de la jeune est complexe: par où commencer? dans quel ordre avancer? que dire? qu'enlever?... Et le choix des mots, si important..
.D'autant plus important que maintenant, toute personne a le droit d'accéder à son dossier, et donc de lire tous les écrits produits par les professionnels qui l'ont accompagné. C'est un droit indispensable. C'est une lourde responsabilité pour nous, travailleurs sociaux.
Je le savais déjà, mais à travers cet écrit, je prends à présent pleinement conscience de la force, du pouvoir de l'écrit, des mots. L'écriture peut faire avancer, réfléchir. Je vous invite à lire Nous...la Cité
"Quand quatre jeunes de banlieue se prennent d'écrire leur quotidien avec un de leurs éducateurs , ça envoie du lourd. Entre provocations policières, soirées à tchatcher dans les halls d'immeuble, jugements et appels, embrouilles à la con, boulots foireux, visites en prison, heures d'ennui et éclats de rire, c'est le quotidien d'un quartier populaire comme tant d'autres qui est raconté. Le quotidien d'une France qui peut exploser à tout moment, qui ne veut pas être un exemple ni un modèle, qui témoigne de la vie, mais aussi de la mort. Un quotidien où l'on enrage plus souvent qu'à son tour, mais où l'on trouve encore la force d'en rire. Un quotidien où des professionnels se démènent pour sauver ce qui peut l'être encore. Où l'on se demande même, par moments, si l'on n'aurait pas plus intérêt à ce que tout pète. Un quotidien que les médias ignorent, que les jeunes taisent parce que trop criant d'être aussi banal que brutal. Un quotidien où la solidarité est à l'oeuvre, où les choses se vivent et s'éprouvent plus qu'elles ne se disent - sauf quand on se décide à prendre son stylo et à écrire, entre rires et larmes, la cité. Car c'est sans doute des mots que viendront les solutions. La découverte de l'écriture et du pouvoir de ces foutus mots. Face à des flics. Face à des juges. Face à soi-même."
"Joseph, je sais pourquoi t’as fait éducateur comme métier. T’aurais jamais eu les couilles de devenir un voyou et surtout t’aurais jamais pu être flic. Du coup, comme ça, t’es entre les deux." Je crois que ce jeune, il a tout compris...
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Dimanche 18 novembre 2012 à 22:03